LE DIAGNOSTIC PETITE PLAISANCE DANS LE NAUTISME: UNE BONNE IDEE OU UN PROJET MORT-NÉ ?
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Dernière mise à jour : il y a 11 heures

Un projet de la FIN se concrétise et vise à mettre en place un système de DIAGNOSTIC adapté aux petits navires de plaisances d’une longueur inférieure à 9 m, voire éventuellement inférieure à 12 m. Aucune tentative, ni en France ni à l’étranger, n’avait pour l’instant abouti pour bien des raisons. Sur les 1 300 000 navires de plaisances stationnés dans tous nos Ports, 90 % font moins de 10 m (chiffre du ministère des Transports) : autant dire que le projet de la FIN a un impact important.
La FIN est initialement un groupement de constructeurs de navires de plaisances, auquel se sont joints tous les métiers de la filière du nautisme.
La Sécurité des navires (commerce, pêche, plaisance) est du ressort de l’autorité des États, que l'on nomme le Pavillon. C’est l’État qui délivre des permis de naviguer aux navires de mer sous tous les pavillons du monde. Sous ces Pavillons, les Sociétés de Classifications reconnues (B V, LLOYD’S, RINA …) sont dûment mandatées par les États pour les tâches les plus techniques et la délivrance de documents équivalents à l’attribution d’un Permis de navigation.
Un Permis de navigation, c’est l’autorisation du Pavillon de naviguer pendant un an à une certaine distance des côtes ou dans une zone bien précise (illimitée, moins de 200 milles, short range moins de 60 milles pour les yachts commerciaux, moins de 20 milles, moins de 5 milles des côtes ou dans les ports et rade seulement). La terre entière fonctionne selon ce système qui marche bien.
Le Permis de navigation est complété par la décision d’effectif du Pavillon, c’est-à-dire de la composition de l’équipage pour un type de navigation donnée (long cours, cabotage, côtière) et les brevets nécessaires.
Les navires de Plaisance représentent moins de 0,001 % du tonnage mondial. La plaisance n’a aucune reconnaissance officielle de l’OMI. Elle est seulement concernée par les grandes Conventions Maritimes (TONNAGE, LOAD LINE, SOLAS, MARPOL, STCW …) quand la taille des bateaux ou le nombre de personnes à bord rentre dans le champ d’application de la Convention Internationale (Dès plus de 24 m ou plus de 16 personnes à bord). Le Permis de navigation et la décision d’effectif sont un « duo » qui permet aux navires de naviguer en règle et bien assurés.
EXEMPLE DE PERMIS DE NAVIGATION


EXEMPLE DE DECISION D’EFFECTIF


Le Pavillon Français donne un Permis de naviguer aux navires de Commerce, aux navires de Plaisances à Usage Commercial et aux navires de Pêches. Il ne donne pas explicitement de Permis de naviguer aux navires de plaisances à usage personnel.
À leur mise en service, les navires de plaisance sont simplement homologués CE à vie comme des machines à laver le linge !
Le système CE est mis en place en 1994 par les constructeurs de bateaux de plaisance : c’est la DIRECTIVE EUR 94/25/EC qui trouve maintenant ses limites. Dans la réalité, la DIRECTIVE visait à harmoniser les normes de fabrication sous tous les Pavillons de l’Europe pour faciliter les échanges et protéger le marché Européen.
La DIRECTIVE ne traite pas du contrôle du navire en cours de vie. Il ne s’agit pas d’un règlement de Classe : seul système qui permette de suivre réellement la santé d’un navire. Ce système est un peu lourd et cher pour la Plaisance non commerciale.
Comment un DIAGNOSTIQUEUR dûment patenté par la FIN pourrait-il donner un avis sur le permis de naviguer d’un petit navire de plaisance, alors que l’État lui-même ne donne aucun permis de naviguer à tous ces petits navires ?
Un tel système ne pourrait fonctionner qu’avec des Inspecteurs petits navires de plaisance d’un Centre de Sécurité des Navires ou bien d’Inspecteurs dûment mandatés par les Affaires Maritimes, comme le sont les Sociétés de Classifications ou un organisme notifié. Cela n’est ni utile et ni faisable quand le système ne vise qu’à influencer le marché des ventes de navires d’occasion, mais n’apporte pas grand-chose à la Sécurité des Navires (une flotte vieillissante qui navigue peu).
Le DIAGNOSTIC fait par le vendeur est une hérésie ; c’est à l’acheteur de choisir son expert pour contrôler le navire convoité. Cela n’est pas au vendeur de favoriser la vente de son bateau en appointant un DIAGNOSTIQUEUR toujours influençable. En théorie, des milliers de petits bateaux susceptibles de passer un contrôle représentent un énorme business pour des organismes forcément bidons et seulement motivés par l’appât du gain.
Quelles solutions pour améliorer la protection des acheteurs de petits navires de plaisance ?
Améliorer le niveau des skipper/propriétaires des petits bateaux de plaisance.
Intégrer plus de culture maritime dans le permis côtier, alors qu’il emprunte davantage à la culture automobile.
Quand les plaisanciers sont des marins débutants : se faire aider par un conseil, un bon Skipper ou un Expert.
Soigner particulièrement le « compromis de vente » avec si possible l’assistance d’un arbitre, le broker qui rédige l’acte de vente.
Obtenir une période de garantie notifiée au contrat de vente avec des clauses protégeant aussi bien l’acquéreur que le vendeur. Les vendeurs professionnels de navires d’occasions devront se « mouiller » davantage.
On se dirige davantage vers la nécessité de réglementer le métier de « broker » en navire de plaisance que d’expert maritime déjà familier avec les Inspections préachats.
La technique des petits navires de plaisance n’est pas une science, mais elle nécessite cependant le recul que l’on a en traitant de navires plus grands : notamment le cadre maritime, le droit et la réglementation maritimes.
C’est une Commission Régionale ou Nationale de Sécurité des navires qui délivre les Permis de navigation à un navire donné.
Un DIAGNOSTIQUEUR ne peut juridiquement donner un permis de naviguer à un navire : il n’a pas de tel pouvoir. Son avis n’a donc aucune importance puisque, de toutes manières, aucun Permis de naviguer n’est délivré aux petits navires de plaisance.
Si le DIAGNOSTIC n’est pas un permis de naviguer, il ne sert à rien ! Il n’est pas un nouveau cadre pour protéger les plaisanciers de l’usage d’un navire innavigable ou dangereux.
Qu’est-ce que l’innavigabilité dans la plaisance ? Traverser l’Atlantique sur un voilier de 6,50 m, c’est navigable, mais pour très peu ! Pour beaucoup d’autres, c’est infaisable !
Les navires, même homologués CE, sont navigables pour les uns et non navigables pour les autres, puisque l’État ne se prononce pas ! Dans la plaisance, les États ont choisi de responsabiliser le Skipper. C’est ce qui ressort aussi des décisions de Justice.
Les Britanniques, très libéraux, vont beaucoup plus loin : ils n’ont aucune législation technique sur la construction des navires de plaisance à usage personnel (Les NUP), comme notre DIVISION 240. La grande majorité des Pavillons n’ont aucune réglementation sur la Sécurité des Navires de Plaisance à Usage personnels.
Le commerce, la Pêche ont une place sur la planète mer ; la plaisance n’a aucun statut : on va sur la mer pour bien gagner sa vie dans un milieu hostile, pas pour glander au mouillage quinze jours par an. Il n’y a aucun moteur économique derrière la Plaisance, comme dans le Transport maritime depuis l’époque du commerce triangulaire jusqu’aux porte-conteneurs géants de CMA-CGM.
Au Commerce, la Construction navale est au service du commerce, alors que la Plaisance est au service de la Construction navale. Les navires de plaisance ne génèrent aucune richesse que celle de la construction navale : combien de temps ce système sans justification économique peut-il tenir ?
D’ailleurs, il y a maintenant une demande forte des plaisanciers à vouloir faire du Transport à passagers avec leurs bateaux. On constate l’essor des plateformes de location type CLICK AND BOAT qui laissent croire au grand public que tout le monde peut faire du charter avec son bateau sans aucun titre de navigation et ni aucun brevet de skipper (CAP 200 JB).
Un système de mise en place du DIAGNOSTIC comparable au secteur de l’automobile n’est pas approprié au cadre du nautisme qui rentre dans un cadre beaucoup plus vaste : celui du maritime.
Les Tribunaux ne manquent pas d’affaires de transactions loupées de navires de plaisances entre particuliers ou professionnels. Le DIAGNOSTIC ne protège personne ; il rendra les affaires judiciaires encore plus compliquées, sans pour autant éliminer les conflits de vente de PITALUGUES liés davantage aux apprentis marins et aux apprentis courtiers (brokers) qu’aux navires eux-mêmes !
Un expert se prononcera sur la navigabilité en tenant compte de tous les facteurs. Le bilan d’un DIAGNOSTIC du vendeur ne se prononcera sur rien !
Il reste préférable en cas de transaction, même d’un petit navire, de consulter plutôt un Expert maritime que de faire un contrôle technique en 250 points organisé par le vendeur qui s’avèrera rapidement comme une arnaque, car les petits navires sont simples dans la réalité. Heureusement, il reste toujours la liberté d’acheter, pas cher, une presque épave et d’en faire un chouette bateau à la hauteur de son rêve d’aventures sur l’eau.
Un expert sera toujours disponible à moindre frais pour conseiller un acheteur de petit navire d’occasion : conseils techniques, conseils sur le compromis de vente ou les chances d’un recours contre un vendeur ou un courtier...
A NICE, le 15 octobre 2025.
Stéphane OBERTHÜR sambo.expert@orange.fr TEL 06 23 48 60 20
Expert maritime
Expert maritime judiciaire





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